Du travail de l’aquarelle …

Pour faire suite au gentil commentaire laissé par mon amie Odette en regard d’une de mes dernières aquarelles, il me semble utile d’apporter quelques précisions sur ma manière – très empirique – de pratiquer. Contrairement à ce qu’elle semble penser, j’essaye de ne pas « fignoler » mes aquarelles … et ce, pour la raison suivante : plus on retouche et re-travaille, plus l’aquarelle perd en transparence, donc en fraîcheur et spontanéité. Je le constate régulièrement en réexaminant les peintures terminées : ce sont toujours les parties que j’ai peintes rapidement, et sans « revenir » dessus qui ont ma préférence ; les couleurs sont très transparentes, et non pas ternes, ni « gouachées » ; les coups de pinceaux ressortent bien, et restituent mieux les textures … en fait, le plus difficile, c’est de s’arrêter ! C’est un peu pour ça que je garde en ce moment sous les yeux ce petit croquis de pierres sous l’eau (à droite à mi-hauteur sur la photo ci-dessous) réalisé en moins de 10 minutes, à « pinceau levé » … après avoir transpiré (au propre comme au figuré, car il faisait très chaud ce jour-là sur le Mont Lozère) pendant une bonne heure et demie sur l’aquarelle du Pont du Tarn qui a justement retenu l’attention d’Odette !
Donc, il ne sert pas à grand chose – sauf si on veut « cochonner » un peu plus le travail – de s’obstiner … alors, que faire ? Eh bien, j’en suis maintenant à faire et refaire les sujets qui me plaisent le plus, en testant des variantes (la simple suppression des plans éloignés du Pont du Tarn a complètement changé la donne), en faisant des études de valeurs sur la base de lavis (à gauche en bas sur la photo) …


… en testant des gammes de couleurs différentes (voir essais chromatiques ci-dessous). Résultat ? Si je ne suis jamais vraiment satisfaite de l’ensemble, j’ai toujours quelque enseignement à en tirer … que j’essaye de mettre en application à la réalisation suivante. Un exemple ? Dans la série de l’Aubaret ci-dessus (que je garde encore sous les yeux, car je n’en ai pas fini avec elle …), la petite aquarelle du haut à gauche a été faite sur le motif l’été dernier. Dernièrement, j’ai fait le lavis à l’encre (à gauche en bas), qui m’a d’abord catastrophé tant l’encre m’a parue opaque (et le ciel plein de pâtés !) ; mais l’ensemble m’a paru suffisamment intéressant pour tenter une autre aquarelle (celle du bas à droite) sur la base de couleurs que j’avais recherchées à l’avance (cf. ci-dessous). Ma conclusion à ce stade ? Je trouve la nouvelle aquarelle beaucoup plus lumineuse et « fraîche » que la première … mais je préfère les couleurs (plus chaudes) et certains graphismes (le pont, le chemin bordé de pierres …) de la première ! Bien évidemment … je ne vais pas en rester là ! D’autant plus qu’à force de m’obstiner, je gagne en confiance et en spontanéité … et un peu en technique, tout de même …

Neige et brouillard …

Côté météo, c’était plutôt « pluie et brouillard » pour les premiers jours de ce stage d’aquarelle dans les Gorges du Tarn. De notre perchoir sur le Causse de Sauveterre, nous avons vu défiler gros nuages et bancs de brumes, qui nous cachaient même parfois le Causse Méjean juste en face. Quant aux températures, c’était pas vraiment la joie, d’autant plus qu’aucun d’entre nous n’avait prévu la garde-robe automno-hivernale ! En fait, nous avons passé une bonne partie des 3 premiers jours « en atelier », ce qui ne veut pas dire que nous avons perdu notre temps pour autant : c’était l’occasion ou jamais de faire un peu de technique et de travailler des sujets « d’actualité » notamment …

… les diverses teintes de gris (ci-dessus la précieuse démonstration d’Alain) que nous avons utilisées dans un paysage de brumes sur les Gorges du Tarn (ç’aurait presque pu être celui que nous voyions de la fenêtre mais vous ne le verrez pas, je l’ai « censuré ») …


… et même des paysages enneigés (d’après une aquarelle représentant la Maison des Chapdelaine, non loin du coin où j’étais installé au Québec il y a encore quelques mois). Inutile de vous dire que nous avons accueilli avec plaisir le retour d’un temps … acceptable (sec, mais avec un fort courant d’air très frais) de jeudi matin qui nous a enfin permis d’aérer pliants et pinceaux devant ce panorama très fleuri …


… interprété comme suit :


L’après-midi s’est déroulée dans une ambiance beaucoup plus estivale, sur une petite plage au bord du Tarn d’où nous avons tenté « d’appréhender » les rochers massifs du Causse Méjean en contre-plongée …

… ça n’est peut-être pas hyper-ressemblant, mais côté couleurs, je me suis éclatée !

Le dernier jour a été consacré à la grande spécialité d’Alain : le carnet de voyage ; au lieu de consacrer plusieurs heures à peindre une seule aquarelle, nous nous sommes arrêtés en de nombreux endroits où nous ne disposions à chaque fois que de 20 à 30 minutes pour réaliser notre « oeuvre ». Un sacré challenge qui m’a beaucoup plu, mais il vous faudra patienter un peu pour en voir les résultats. A suivre …

Repiquage ou repêchage ?

Toujours est-il que j’ai signé sans hésitation pour une deuxième semaine ! Ca n’était pas gagné d’avance. D’accord, je savais que j’aimais l’aquarelle ; mais suffisamment pour peindre 6 heures par jour pendant 5 jours d’affilé ? Et puis, ceux qui me connaissent savent que j’ai beaucoup de mal à m’adapter à (subir ?) la vie de groupe ; ça n’est pas seulement une question d’esprit de contradiction (quoique je sois assez bien pourvue de ce côté-là …), mais surtout un besoin permanent et irrépressible d’autonomie qui m’a toujours fait privilégier les chemins de traverse aux grands axes (au sens propre comme au figuré). En fait, je suis bel et bien le contre-exemple du mouton de Panurge, et mon style « électron libre » n’est pas toujours compatible avec la fréquentation de mes semblables 14 heures sur 24. Dernier point – et non des moindres – comment allais-je m’entendre avec Alain Marc ? Mes précédentes tentatives en matière de cours (2 fois 3 mois il y une huitaine d’années) avait plus ou moins tourné cours : je voulais peindre à l’aquarelle, et me suis retrouvée à chaque fois à faire du dessin (que j’ai assez apprécié) et de l’acrylique (bof !), et même du pastel (là, je n’ai pas vraiment adhéré). Cette fois-ci, j’ai travaillé avec un aquarelliste de métier, qui privilégie le travail « sur le motif » dans la perspective de pochades et de carnets de voyage et ça change drôlement la donne ! Tout au long de la semaine, les difficultés sont allées croissant, bien que nous n’ayons jamais eu l’impression de « faire de la technique ». Pour moi qui débutais à zéro – je n’avais même jamais vu un aquarelliste travailler – tout était neuf ; mais ce qui m’a ouvert vraiment un nouvel horizon, c’est de voire comment Alain corrigeait nos oeuvres : en quelques coups de pinceaux (ajout d’une transition entre deux plans, rappel d’une couleur, retouche graphique, etc.), il parvenait à donner du caractère là où nous ne voyions qu’un horrible barbouillage … Du coup, l’essai de cette première semaine de stage était bel et bien transformé, et je n’avais plus aucune hésitation pour m’inscrire au prochain stage dans les Gorges du Tarn. Et je rêve de plus en plus au deux semaines au Maroc en octobre prochain … sous réserve que mon projet-phare (je vous tiens au courant prochainement, promis) m’en laisse le loisir.
Et maintenant, place à quelques images de la semaine …

Premier lever de soleil, pris de ma fenêtre – La semaine s’annonce plutôt bien …

Première séance de travail, dans le jardin même de l’abbaye …

… et le lavis qui en résulte.

Sujet du jour : le coquelicot (alizarine + rose pemanent)

Admirez ce champ sur lequel nous avons planché un moment,
mais vous ne verrez pas l’aquarelle, pas franchement à mon goût.

La chapelle Saint Sixte, de face cette fois …

… la même aux pinceaux.

Paysage provençal typique : un mas avec un champ d’oliviers en premier plan …

… et son interprétation.

L’aquarelle, on peut aussi la travailler à la plume et à … la brosse à dents !

A l’issue d’un petit port de pêche (pas montrable à mon avis) qui nous a donné pas mal de fil à retordre, place à la créativité (projection de taches sur papier mouillé) pour ce Pont Flavien, avec lequel nous nous sommes bien amusé, et qui a donné des résultats tout à fait intéressants.

L’aube se lève – orageuse – sur le jour du retour.

C’est-fi-ni … jusqu’au prochain stage, of course !